L’ETIQUETTE BIEN-ETRE ANIMAL, WELFARE-WASHING OU VRAI PROGRES ?

Le 28 janvier 2020, sous la pression des ONG, le gouvernement annonce 15 mesures en faveur du bien-être animal. Parmi elles, l’intention de déployer une information consommateur claire au travers de l’expérimentation d’un étiquetage “bien-être” animal.

Dans la foulée de cette annonce, Carrefour, Galliance et les magasins U annoncent l’arrivée prochaine de la fameuse étiquette dans leurs rayons. Ils rejoignent ainsi l’Association Étiquette Bien-Être Animal (AEBEA), créée en 2018 par des ONG (LFDA, CIWF, l’OABA) et le groupe Casino. Car en effet, cet étiquetage existe déjà pour les poulets (1).

Je me suis souvent questionnée sur le bien-être animal (le courant du « welfarisme ») en me demandant dans quelle mesure cela constituait une opportunité de faire avancer la condition des animaux d’élevage ou au contraire, un risque de faire accepter l’inacceptable. Aujourd’hui, en moi, les deux scénarios cohabitent.

Alors je me suis dit que me mettre à la place d’une poule m’aiderait à réfléchir.

Voici la fameuse étiquette :

 

Si on développait une grille sur le « bien-être humain », et que vous étiez dans le haut du panier (A), voilà à quoi ressemblerait votre existence :

Vous vivez dans un appartement de 25 m2, avec 10 colocataires (2). On vous a mis une fenêtre et un extérieur auquel vous avez accès quand les conditions le permettent. Vous avez 1 an et demi (3) et on vous fait monter dans un camion. Vous allez rouler pendant trois heures. Vous arrivez dans un lieu ou vous allez être tué. Suspendu par les pieds, vous serez étourdi, puis on va vous trancher la gorge.

Mais bon, rassurez-vous : tout ça est filmé ! Ce qui améliore grandement votre bien-être n’est ce pas ?

Si vous aviez été classé D, vous auriez eu 3 copains de plus dans l’appartement ; vous auriez été enfermé non stop pendant 1 an sans jamais pouvoir échapper à la lumière artificielle. Puis après 8 heures de camion, on on vous aurait zigouillé sans même immortaliser ça en vidéo.  

Vous êtes encore là ? Alors, je vous adresse deux questions:

  1. Si elles constituent un progrès indéniable dans la transparence au consommateur, pensez-vous que la poule étiquetée A est une poule heureuse ?
  2. Et dans quelle mesure cet étiquetage contribuera t’il à nourrir les stratégies marketing des industriels pour soulager votre conscience de consommateur ?

Pour autant, je ne peux que reconnaître et saluer le travail de ces associations welfaristes, qui s’inscrivent en complémentarité des associations lanceuses d’alerte en accompagnant les filières. Car tant que les filières ne sont pas prêtes, les projet de lois sont systématiquement rejetés.

Pour aller plus loin, je vous invite à lire mon article sur la manipulation du langage autour de la notion de bien-être animal.


1. Etiquetage bien-être animal : http://www.etiquettebienetreanimal.fr

2. Base de mon calcul : rapport poids / espace, sur la base d’un poids moyen d’un poulet de chair 2,5kg et d’un humain de 62kg.

3.Base de mon calcul : comparatif entre la durée de vie moyenne d’un poulet (12 ans) et celle d’un humain (75 ans). NDLR : Oui, je sais, c’est foireux puisque vous pesez 62kg à 1an et demi, mais bon, ça n’a rien de scientifique, c’est juste pour l’exemple 🙂

En bonus : des infos sur les conditions d’élevage en France : https://www.viande.info/elevage-viande-animaux