LETTRE OUVERTE A LA CHAMBRE D’AGRICULTURE DE HAUTE VIENNE

Chère équipe de la Chambre d’Agriculture de la Haute Vienne,

Je vous remercie d’avoir pris le temps de me répondre et de m’informer pourquoi vous ne me recevriez pas (1).

Vous expliquez que « malgré ma volonté affichée de dialogue, et au regard de mes publications (…), vous doutez de ma bonne volonté à aider les agriculteurs. » 

Vous avez raison.

En effet, je ne marche pas pour défendre les intérêts des gens de la terre. Je marche pour défendre ceux des animaux. Et j’avoue ne pas comprendre en quoi ces intérêts sont incompatibles, surtout sur votre territoire.

Votre élevage est extensif, les vaches sont au pré une bonne partie de l’année, la région Aquitaine, « Première région engagée en faveur du bien-être animal » en France…Alors pourquoi refuser de me recevoir ?

Durant ces trois mois de marche, les député.e.s que j’ai rencontré sur la question des animaux m’ont dit :

« On ne peux pas imposer de nouvelles contraintes à une profession déjà en souffrance ».

« Les pratiques changent, évoluent. Il faut laisser du temps, accompagner. 

Lorsque je demande : ok. Qui pour les accompagner ? 

On me répond : les Chambres d’agriculture. C’est pourquoi il m’a paru naturel de vous questionner sur la manière dont ce sujet est pris en considération dans votre département.  Non pas pour affuter mes arguments comme des couteaux.  Mais pour intégrer dans ma réflexion vos considérations et votre réalité.

👉A l’heure où le gouvernement annonce des mesures en faveur du bien-être animal, 

👉A l’heure où vous reprochez aux gens de la ville de ne pas comprendre votre métier, 

👉A l’heure ou ces mêmes gens de la ville s’intéressent à ce qu’ils ont dans l’assiette,

👉A l’heure où des vidéos prises dans les élevages montrent ce qu’on aurait préféré ne pas voir,

👉A l’heure où le fossé se creuse entre consommateurs et agriculteurs, et où la défiance s’installe, 

N’est ce pas justement important et nécéssaire de comprendre, de dialoguer, d’expliquer ?

Les gens de la terre sont ils pas les premiers à être concernés par les droits des animaux ?

Est-ce insensé de penser que les intérêts des éleveurs et ceux des animaux ne s’opposent pas ? 

Est-ce irraisonné de vouloir mieux comprendre comment les faire avancer conjointement ?  

Mais au-delà de toutes ces questions que j’avais envie de vous poser avec sincérité, la plus importante d’entre elles me semble être : Est-on capable de dépasser les représentations caricaturales que nous avons des éleveurs et des militants des droits des animaux ?

Votre réponse semble indiquer que non.

Sachez que malgré mon immense tristesse de voir autant d’animaux tués pour notre plaisir, je veux rester bienveillante et continuer à comprendre le monde dans lequel je vis en posant des questions. Et même si vous semblez en douter, je me sens profondément solidaire et reconnaissante du monde paysan qui nous nourrit. 

Nous sommes tous – institutions, consommateurs, citoyens, distributeurs, législateurs – complices d’un système injuste dont humains, animaux et environnement payent le prix. Puissions-nous essayer, ensemble, de réconcilier nos intérêts pour inventer un avenir plus juste et plus soutenable pour tous.


(1) Réponse du président de la chambre d’agriculture de Haute Vienne à ma demande de rendez-vous

Madame Charlotte Arnal, mon rôle est de défendre l’intérêt des paysans et des paysannes (les éleveurs en particulier) et je m’y consacre pleinement.
Malgré votre volonté affichée de dialogue, au regard de vos publications, vos réflexions et les sources que vous citez, nous doutons pleinement de votre bonne volonté à aider les agriculteurs et à défendre leurs intérêts. En menant ce combat idéologique, ne souhaitez-vous pas qu’une seule chose, la disparition de l’élevage et des éleveurs ?
Nous avons, au sein du bureau de la Chambre d’agriculture, un représentant d’association environnementale avec qui nous travaillons en étroite collaboration. Nous avons d’ailleurs, à notre actif, quelques belles réussites, notamment la BACC 87 (Brigade d’Action Contre les Corvidés) !
Je ne vous recevrez pas. Par contre, des membres de mon équipe et M. le Président de la
Fédération des Chasseurs de la Haute-Vienne, représentant ladite association, sont prêts à vous accueillir !
Bertrand Venteau, Président de la Chambre d’agriculture 87